Hier j'ai revu le film "Tron" (1982).
Ce film, adulé par toute une génération geek, présente un créateur de jeux vidéos luttant pour sa reconnaissance en tant qu'auteur d'un blockbuster des salles d'arcades et dont la paternité a été flouée par un opportuniste qui en a profité pour monter un véritable empire numérique, construisant une entité dont il perd progressivement le contrôle, une intelligence artificielle supérieure, qui s'immisce même jusque dans le Pentagone.
Oui, vous avez bien lu, au départ c'est une histoire de droit d'auteur qui est le ciment de l'histoire de ce film produit par Disney. D'ailleurs, sa suite est programmée pour bientôt si le travail des scénaristes sur cet exercice de style, autant esthétique que scénaristique, vous intéresse.
Tout cela pour dire que parfois je ne comprends pas trop cette obsession de la paternité d'un auteur. En fait, je suis de mauvaise fois, j'ai quelques pistes. Si nous partons dans la sémantique, le terme "pater-nité", qui se réfère donc au père, mais aussi à une notion d'héritage, et donc d'ordre naturel. Les auteurs chercheraient-ils donc à faire reconnaître un "ordre naturel" ? Doit-on aussi se référer à la psychanalyse (figure du père, œdipe...) ?
D'ailleurs pour nous éclairer, le législateur nomme les œuvres dont l'auteur n'a pas été retrouvé, des œuvres "orphelines"... orphelines de père ? ou de mère ?
Et cela pose un soucis énorme pour gérer ce "complexe du manque de géniteur" ! Comment retrouver des inconnus ? Et surtout comment gérer les droits qui tombent de ces personnes, fantômes de la création ? Certains anciens maires peuvent créer des électeurs en inventant des noms de rue, les prolongeant, trouvant des immeubles sur des parcs publics...
Le Sénat quant à lui y répond avec ce projet de loi.
Bien appuyé par une note du CFC, Centre Français d'exploitation du droit de Copie pour lequel il s'agit "d'adopter un mécanisme de régulation de la diffusion des œuvres opposable au modèle économique de la gratuité.»Il s'agit donc là d'aller contre la volonté d'auteurs de vouloir publier gratuitement leurs œuvres. Car forcément, ils "seraient fous, inconscients, rêveurs" de ne pas vouloir "profiter" de leurs justes droits...
Imaginez cette scène avec, par exemple, un jeune qui hésite à s'inscrire au Pôle Emploi à la fin de ses études (et il y en a beaucoup qui ne veulent pas se sentir montré du doigt comme étant un "chômeur profitant du système"). Il galère, forcément. Imaginez qu'une proposition de loi, votée par le Sénat, veuille obliger toute l'administration publique à retrouver les probables bénéficiaires d'aides pour le leur verser "après des recherches sérieuses et avérées". Ce serait chouette, non ? Totalement improbable, inconscient, fou, rêveur...", et bien non, ce système existe pour les éditeurs dans notre beau pays !
Les lobby savent décidément bien comment manœuvrer en démocratie pour défendre leurs seuls intérêts... et les citoyens se doivent d'être encore plus vigilants et informés pour y faire face... le pourrons-nous tout le temps ?
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