mardi 12 juillet 2011

Hadopi, ou le meilleur outil de mesure de l'inaction

470 000 personnes ont donc reçu un mail... pour 18 million d'infractions constatées par les ayant-droits... 1 chance sur 38 environ, puis pour les 20 000 deuxièmes lettres... 1 chance sur 900... tout cela à comparer avec le 1 milliard de fichiers échangés annoncé par la Ministre Albanel... anéfé.

Donc aujourd'hui, le P2P, c'est 18 millions de téléchargements d'œuvres empêchées ? J'ouvre ici une porte sur un terme qui me semble important à expliciter. Une "œuvre empêchée", est une œuvre qui ne peut trouver son public du fait de sa non diffusion, de sa non "communication au public" (pour reprendre un terme de l'article L. 211-3 du Code de la Propriété Intellectuelle). On connaît ce type de phénomène avec les distributeurs qui vont préférer tel ou tel artiste à mettre en avant sur leurs rayonnages (réels ou virtuels), avec les médias qui vont préférer les productions de leurs actionnaires (canal plus / itele avec sfr/universal, tf1/m6 avec bouygues/endemol/sony/bmg...).

Je parle bien évidemment au pluriel. Les "médias, distributeurs" peuvent avoir leur politique éditoriale comme toute programmation culturelle de salle de spectacle ou de festival. Par contre, nous constatons que beaucoup de leurs programmations sont similaires, la diversité, le pluralisme culturels sont souvent des parents pauvres des rediffusions des chaînes de la tnt, ou des playlistes des radios les plus écoutées (rtl, nrj...)...

Le concept d'œuvre empêchée vise donc à préciser qu'une œuvre qui ne touche pas de public, est donc une œuvre qui tombera dans les limbes des catalogues obscurs des bases de données impersonnelles.

Le P2P, c'est avant tout, le téléchargement des œuvres qui fonctionnent, qui rapportent de l'argent. Les statistiques de nombreux sites de téléchargement montrent que les fichiers les plus téléchargés sont souvent ceux qui sont les plus vus au cinéma, les meilleures ventes de disques... Mais c'est aussi un outil de promotion important pour de nombreux artistes qui n'ont pas accès aux têtes de gondole des sites de sélection musicale, des tv ou radios (je n'y pensais même plus !).

Alors Hadopi roule pour qui ? Pour le droit d'auteur ? Oui, très certainement, comme lors d'une réunion publique de l'Hadopi à Lyon récemment, je pense qu'ils sont dans les clous légaux sur l'application de la loi, moins par contre dans les collectes d'informations des abonnés citoyens.
Il convient de rappeler qu'ils représentent une vision du droit d'auteur, la partie patrimoniale, restrictive à l'encontre des publics, criminaliste, et totalement hors des réalités des usages, hors des réalités culturelles, et surtout hors de toute pensée globale sur la culture et sa diffusion dans ce pays.

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